Connexion-Berlin: Théatre : Christoph Schlingensief

À la hauteur du KW (centre d'art contemporain Kunstwerke), la Auguststrasse est à demi obstrué par un « Algeco » à deux étage. Un spectacle qui en soit n'aurait rien d'inconditionnel ni pour Berlin ni pour ce quartier, si ce n'est qu'au fait de l'édifice sied un énorme panneau où l'on peut lire "Etranger dehors"... (?) ...

Esthétiquement le panneau ressemble à ceux où sont écris les noms des stations dans le Métro. Il rappelle vaguement quelque chose d'officiel... Un slogan xénophobe, officiellement autorisé parl'ordnungsamt, service administratif de l'ordre public chargé de délivrer les autorisations pour les manifestations sur la voie publique, dans la ville où le mémorial est roi et fait loi, force à l'agitation neuronales... Le Sénat par accès de démocratie, aurait-il accordé un mémorial à l'extrême droite?

Le slogan érigé en symbole est d'autant plus fort dans ce quartier historiquement juif, portant donc les stigmates de ce que l'ostracisme a pu engendrer de pire.

Malgré la proximité historique qui a fait preuve de la démence à laquelle mène le nationalisme, la crise en terme générique réactualise le phénomène.

Que celle-ci soit liée au capitalisme ou due aux confrontations ethniques ou religieuses, qui de toute façon ne sont souvent que le résultat de nos politiques occidentales historiques, c’est-à-dire le colonialisme et autre after-war-resolution- post-conflic, tout est bon pour que s'instaurer le réflexe du mouton noir... Juif Süss ou pas, travailleurs immigrés avec ou sans papiers, étrangers de tout genre, Rom, ...

Cela dit dans la Auguststrasse, on est loin de la visqueuse et lâche quenelle; On annonce la couleur. "Stigmatiser par provocation" est la devise du travail de l'absolument politiquement incorrecte Christoph Schlingensief.

Le KW offre une rétrospective à cet enfant terrible adulé et honni, trublion social et provocateur dont le cynisme dérange ici plus qu'ailleurs... Schlingensief passe au scalpel de son auto dérision et de son humour intelligemment grinçant, tous les poncifs socio-politico-historico-culturel allemand.

Il applique son don particulier pour la formule: Egomania-Insel ohne Hoffnung (Egocentrisme-Ile sans espérance, adaptation de Faust), Rocky Dutschke 68, Das deutsche Kettensägenmassaker (Massacre allemand à la tronçonneuse) et Terror 2000 - Intensivstation Deutschland (Terreur 2000 – Allemagne en réa), Rettet den Kapitalismus, schmeißt das Geld weg! (Sauve le Capitalisme, jette l'argent!), à la télévision, au cinéma, au théâtre, au cours de performances, à l'opéra.

Expérimentateur impénitent, il sonde toutes formes de relation au public, qu'il invite à participer, qu'il fait bouger, sortir du théâtre, visiter la scène. Il signe les décors qui sont en soi des installations. Ses acteurs représentent eux aussi le vaste panel du commun des mortels, il fait très souvent appel à des acteurs non professionnelles issues de toutes catégories sociales et de toutes classes d’ages.

De 2004 à 2007, Bayreuth le courtise et il se voit confier la mise en scène de Parsifal, qu'il inaugure par un

"Rallye Wagner" qui tourne dans toute l'Allemagne, sorte de raillerie en mode populaire du très exclusif festival.

Schlingensief quitte définitivement la scène en 2010, laissant une oeuvre considérable en qualité et en quantité.

La scène artistique lui rend un dernier hommage, par une invitation posthume à représente l'Allemagne pour la biennale de Venise de 2011.

schlingensief.com