9.10.17

Art : Exposition, Collision. Dans le labyrinthe des hasards étranges.





L'observation de la réapparition massive du collage et de l’assemblage dans la pratique des artistes contemporains est à l’origine de l’exposition Kollision. Im Labyrinth der unheimlichen Zufälle (Collision. Dans le labyrinthe des hasards étranges).



Techniques récurrentes, qui réapparaissent dans un monde contemporain globalisé et « virtualisé », où tout est pêle-mêle accessible, simultanément et indépendamment des l’époques, des catégories, des sujets… Ce phénomène  que l’on peut comparer à l’avènement de l’électricité au début du 20 ème siècle – La fée électricité-, ou à celle de la démocratisation des méthodes de reproduction de l’image, influence au même titre la pratique des artistes contemporains.

Au début du 20 ème, Braque et Picasso 1  introduiront sous le nom de « papiers collés »,  ce qui reprit et largement utilisés par Dada2  prendra le nom de collage.  Pour les premiers, papiers puis objets collés sur la toile participaient de l’expérimentation de la tridimensionnalité et de la question de la représentation. Pour les seconds, le collage prendra la valeur d’une antipeinture  exprimant la volonté  de Dada, de remettre  en cause la pensée et l’expérience créatrice.
Repris par les surréalistes, collage et assemblage vont, comme le souligne Werner Spies, au contraire du « nihilisme esthétique » de Dada4, être utilisé pour leurs caractères « ouverts »4.
En effet, grâce à aux analogies fantasmagoriques et poétiques, aux dissonances et à l’étrangeté qu’elles produisent, ces techniques vont être considérées comme autant de procédés possibles, ouvrant au renouvèlement de l’expérience créative et nécessaire à l’expression d’une esthétique nouvelle.

C’est précisément cet ensemble de possibilités et d’expérimentations créatives, fait de ruptures et de continuités, qui fait écho à une situation contemporaine où le modèle du Net s’est imposé. La simultanéité et la virtualité y produisent autant de rupture et de continuité.

Mais le modèle de l’Internet appliqué à la communication et à l’information, a aussi une influence notable sur le statut actuel de l’image. 
La rapidité d’accès de plus en plus réclamée par les utilisateurs, fait que d’une façon générale l’image retrouve son statut de medium privilégié. Un statut originalement iconique, c’est-à-dire de signe, souvent plus immédiat que le texte. La généralisation de l’utilisation des émoticônes en est un exemple. L’image est omniprésente, polymorphe, accessible  et utilisable de façon permanente.
Nonobstant cette ubiquité  de l’image, tous types d’informations, de bibliothèques, de réseaux, de pensées et d’opinions se trouvent en libre circulation. Déjà en 2001, Nicolas Bourriaud dans Post production5  en analysait la tendance sur la production artistique.
Actuellement,  de plus en plus d’artistes puisent, autant dans les répertoires de formes picturales et esthétiques mise en circulations, que dans la masse d’informations circulant en flux continus et indifférenciés : géographie, temps, catégorie, forme, dimension, pensée, économie, politique, culture, esthétiques, …  Sans tomber dans l’écueil de la citation Postmoderne, ces artistes utilisent ces références pour en distendre les limites d’une réinterprétation créatives. 
Ce répertoire, ou fond «d’accessoires» se constitue en motif, qu'ils utilisent, combinent et déclinent et dont la collision produit des étrangetés, qui présentent certaines analogies avec le surréalisme. C’est à ce point de rencontre, que l’exposition Kollision Im Labyrinth der unheimlichen Zufälle s’attache.

Ce phénomène, qui émerge au sein d’une tendance conceptuelle établie, semblait encore récemment impossible ou impensable. Le Surréalisme ayant souffert en son temps d’une mauvaise réception de la critique américaine, puis d’un essoufflement progressif jusqu'à sa dissolution dans les années 60, n’a pas été pendant longtemps  vu à sa juste valeur et ne se constituait pas en références avouables.
Un recul permettant une relecture distancée, l’évolution de l’environnement technologique  et un certain contexte économico-politico-écologique, peuvent permettre ce rapprochement.

Il n’est cependant pas question ici de parler d’un retour du Surréalisme, aucun artiste ne s’en réclame, mais plutôt de remarquer une proximité ou une analogie, une affinité.
Et si l’on considère que la pratique contemporain du collage et de l’assemblage se fait en puisant dans un fond constitué de motifs « recyclés »6,  on peut aussi comparer le phénomène, à celui-ci au sampling apparu dans les modes de création musicale, à partir des années 70 et qui s’est généralisé dans les années 90 avec la musique Techno et Electro. La brèche ouverte par la musique s’est élargie, au domaine des Arts plastiques.
Mais collages et assemblages ne sont pas les seules techniques utilisées par les artistes présentés, permettant de faire un parallèle  entre pratique contemporaine et surréalisme
L’utilisation de l’accident, la sérendipité, la juxtaposition, qui peut par ailleurs aussi être comparée au mode d’une flânerie virtuelle sur le Net, se constitue en mode poétique. Pour les surréaliste la forme poétique était le médium privilégié,  car nous le dit René Crevel : « La poésie ainsi, lance des ponts d’un sens  à l’autre, de l’objet à l’image, de l’image à l’idée, de l’idée au fait précis (…)».
Mais encore en prônant l’abolition de la hiérarchie des catégories techniques dans l’utilisation de toutes les formes d’expression humaine telles que la peinture, la photo, l’écriture, le dessin, le film, les surréalistes ne préfiguraient-ils pas  l’installation contemporaine, genre devenu incontournable ?

Le renouvellement esthétique cherché par les surréalistes ne pouvait en passer que par la notion de révolution, car il devait pour ce faire passer par « la destruction du principe de causalité et du positivisme », qui régissait la pensée et la société européenne à l’époque du chaos moral, social et politique de la Première Guerre mondiale.

Aujourd’hui, l’heure n’est plus aux révolutions, la chute du communisme semble avoir mis un point à toutes formes d’utopie. Malgré cela, le climat de trouble et d’incertitude qui est devenu le lot quotidien de nos sociétés mondialisées, replace l’humain au centre des débats.         

Les démissions climatiques et autres tracas politiques ont  peu à peu raison, de la suffisance humaine. Notre fragilité, mise à nu, nous recentre l’homme dans le discours esthétique, redonne une place à l’humain dans les motivations artistiques. Une fois de plus, le contemporain croise le surréalisme, qui historiquement est lui apparut aussi dans une période de bouleversements. (...)

Kollision 
02.04 - 26.06.2016 
Curation et scenographie Conny Becker und Marie-josé Ourtilane 
Kunstraum Kreuzberg/Bethanien

Avec : Astali/Peirce, Manon Bellet, Matti Isan Blind, DAS INSTITUT, Tatiana Echeverri Fernandez, Roland Flexner, Heike Gallmeier, April Gertler, Yunchul Kim, Birgit Krause, Alicja Kwade, Jan-Holger Mauss, Myriam Mechita, Jérôme Poret, Thomas Rentmeister, Roman Schramm, Michael Schultze, Ivan Seal, Heidi Sill, Henrik Strömberg, Claudia Wieser, Zoé T. Vizcaíno 
Performance de Jérôme Poret et Pharoah Chromium pour le Vernissage 


Roman Schramm : Installation
Photo Ⓒ mj Ourtilane
Henrick Strömberg : Photo, Alicja Kwade : Installation
Photo Ⓒ mj Ourtilane
 
Myriam Mechita : Dessins, Céramique, Objets
Photo Ⓒ mj Ourtilane
 Myriam Mechita : Dessins, Céramique, Objets
Photo Ⓒ mj Ourtilane

Michael Schultze : Installation, Yunchul Kim : Boites
Photo Ⓒ mj Ourtilane

Heidi Sill : Collages
Photo Ⓒ mj Ourtilane
DAS INSTITUT : Photos
Photo Ⓒ mj Ourtilane
  
Manon Bellet : Papier brulé, Henrick Strömberg : Photos
Photo Ⓒ mj Ourtilane

Henrick Strömberg : Photos, Mati Isan Blind : Video, Ivan Seal : Peinture
Photo Ⓒ mj Ourtilane


Thomas Rentmeister : Mur, Jan-Holger Mauss : Grattage
Photo Ⓒ mj Ourtilane

Claudia Wieser : Installation
Photo Ⓒ mj Ourtilane

Claudia Wieser : Installation (détail)
Photo Ⓒ mj Ourtilane

Ivan Seal : Peintures, Tatiana Echeverri Fernandez : Objets
Photo Ⓒ mj Ourtilane

Tatiana Echeverri Fernandez : Objets
Photo Ⓒ mj Ourtilane

Ivan Seal : Peintures, Thomas Rentmeister : Mur
Photo Ⓒ mj Ourtilane

Ivan Seal : Peintures
Photo Ⓒ mj Ourtilane

Heike Gallmeier: Installation
Photo Ⓒ mj Ourtilane

Performance de Jérôme Poret et Pharoah Chromium
Photo Ⓒ mj Ourtilane



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